Fusterlandia : un monde hallucinant
À quelques kilomètres du centre de La Havane, dans le quartier côtier de Jaimanitas, s’étend un univers qui défie l’imaginaire : Fusterlandia, l’œuvre monumentale de José Fuster. Surnommé le Gaudí des Caraïbes, cet artiste cubain a transformé son environnement en une mosaïque vivante, où chaque maison, chaque mur, chaque banc devient une pièce d’art.
L’artiste et son art
Né en 1946, Fuster s’est formé comme peintre et sculpteur, mais c’est la céramique qui lui a permis de donner corps à sa vision. Inspiré par Antoni Gaudí à Barcelone et par le surréalisme populaire cubain, il a entrepris, dès les années 1990, de métamorphoser son propre atelier. Peu à peu, les voisins se sont laissés séduire par cette explosion de couleurs et de formes. Aujourd’hui, plus de 80 maisons du quartier sont recouvertes de mosaïques, créant une œuvre collective et communautaire.
Ce qui frappe à Fusterlandia, ce n’est pas seulement la profusion visuelle — escaliers recouverts de carreaux multicolores, toits ornés de figures mythologiques, murs transformés en fresques — mais la dimension sociale du projet. Fuster n’a pas cherché à isoler son art dans une galerie élitiste : il l’a offert à son quartier, faisant de Jaimanitas un musée à ciel ouvert. Chaque habitant est devenu acteur de cette transformation, chaque façade raconte une histoire.
Pour le voyageur, Fusterlandia est une immersion dans un monde hallucinant, où l’art dépasse les frontières de l’esthétique pour devenir un mode de vie. On y retrouve l’esprit cubain dans toute sa vitalité : la créativité face aux contraintes, la beauté surgissant du quotidien, la solidarité comme moteur de l’art. C’est une expérience qui ne se consomme pas, mais qui se vit, en marchant dans les ruelles, en découvrant les détails cachés, en dialoguant avec les habitants.
Les valeurs de Fusterlandia sont multiples : dans l’artistique on y trouve un langage visuel unique, fusion de Gaudí, Picasso et de l’imaginaire cubain ; dans le sens du patrimoine, il est un quartier transformé en œuvre collective, inscrit dans l’histoire contemporaine de Cuba ; dans ce qui concerne le social : l’art comme vecteur de cohésion et de fierté communautaire.
Aujourd’hui, le projet attire des visiteurs du monde entier, mais conserve son authenticité. Ce n’est pas un parc thématique, c’est un quartier vivant, où l’art et la vie se confondent ; un lieu qui incarne la rencontre entre patrimoine, créativité et hospitalité cubaine.
En franchissant les portes, on ne visite pas seulement un site artistique : on entre dans un rêve éveillé, une utopie colorée qui continue de grandir, mosaïque après mosaïque. José Fuster a donné à Cuba un monde hallucinant, et à chaque voyageur, la possibilité d’en faire partie.
